Printemps à contretemps
Que sont pour moi les feux des aubes printanières,
Les rameaux, les bourgeons, les floraisons premières,
Les tanières, les nids dans leur frissonnement;
Qu’est pour moi le printemps, sinon un grand tourment.
Ruisseau, taris ton cours, ma peine te remplace,
Et mes larmes bientôt rouleront à ta place,
Jusqu’aux confins des mers où la douleur s’éteint,
Où l’onde sans remous lâche ce qu’elle étreint.
Émois assourdissants de la forêt qui gronde,
Cessez ! Vous semblez un tonnerre sur le monde.
Je cherche le silence au milieu des tombeaux,
Et préfère à vos luths, l'aigre chant des corbeaux.
Ô Printemps, vois le mal qui doucement me ronge;
Je ne côtoie l’amour que l’espace d’un songe.
Réchauffe ces hivers qui habitent mon coeur,
Que ton foisonnement étouffe ma rancoeur.
Je prendrai tes éclats, tes fredons, ta musique,
Et les déposerai dans le coeur angélique
De celle qui, un jour, en me prenant la main,
Fleurira mon destin aux printemps de demain.
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